Picasso... à Landerneau
Après vous avoir donné mes impressions sur l'exposition, je souhaitais tout de même revenir dessus pour vous donner peut être envie d'y courir avant qu'elle ne soit terminée ! (cliquez sur les photos pour les voir en entier)
"L'art lave notre âme de la poussière du quotidien" (Pablo Picasso)
" Plus de 200 œuvres, une exposition majeure et singulière puisqu’il s’agit des Picasso de Picasso. L’artiste avait gardé toute sa vie, dans ses différents ateliers, des centaines d’œuvres. A sa mort, sa veuve, Jacqueline, en hérita d'une partie. Celle-ci, puis sa fille Catherine Hutin, ont œuvré à leur diffusion lors de nombreuses manifestations Picasso dans le monde entier. " (FHEL)
Picasso avant Picasso
Dans la première salle, on peut être surpris par les premiers essais en peinture de Picasso. Il signe alors sous son nom de naissance avant de ne garder plus tard que le nom de sa mère : Picasso. Il faut dire que son père était lui même peintre et professeur de dessin... Un cheminement quelque peu "normal" finalement de s'affranchir peu à peu de l'influence de son père. C'est en 1899 qu'il abandonnera l'enseignement officiel pour suivre sa propre voie.
" Les différentes manières que j'ai utilisées dans mon art ne doivent pas être considérées comme une évolution, ou comme des étapes sur le chemin qui mènerait à un idéal de peinture inconnu. Tout ce que j'ai jamais fait a été pour le présent et dans l'espoir que cela reste toujours dans le présent. Je n'ai jamais pris en compte l'esprit de recherche. [...] Je ne crois pas avoir utilisé des éléments radicalement différents dans les diverses manières que j'ai employées en peignant. Si les sujets que j'ai voulu exprimer proposaient plusieurs modes d’expression, je n'ai jamais hésité à les adopter. [...] Dès que j'ai eu quelque chose à dire, je l'ai dit de la manière dont je pensais qu'il fallait le dire." (Dans "Picasso Speaks", interview par Marius de Zayas, The Arts, New-York, mai 1923)
Cubismes
Picasso s'installe à Paris en 1904 et prend un atelier au Bateau-Lavoir à Montmartre (je m'étais régalée à lire la vie du peintre à partir de cette époque dans les 4 tomes de BD de Julie Birmant et Clément Oubrerie (Dargaud 2012-2014)
A cette époque là, il vit avec Fernande Olivier qui est aussi son modèle."... les découvertes de Van-Gogh, Ingres, Gauguin, Cézanne et des arts ibériques et africains auront des conséquences sur l'évolution de sa création, avec l'invention du cubisme : perspective et canons traditionnels de la beauté sont oubliés, avec une schématisation des formes recréées sous des aspects différents et simultanés." (FHEL)
"Un des points fondamentaux du cubisme visait à déplacer la réalité ; la réalité n'était plus dans l'objet, elle était dans la peinture... [...] Nous étions réalistes, mais dans le sens du dicton chinois : "je n'imite pas la nature, je travaille comme elle." (propos rapporté par Françoise Gilot et Lake Carlton dans Vivre avec Picasso, 1965)
Métamorphoses
Des changements dans sa vie conjugale font passer Picasso d'Olga Khokhlova (sa femme depuis 1918) à Marie-Thérèse Walter qui a 17 ans... avec une transformation du corps féminin, passant de traits angulaires à des formes plus calmes et épanouies "métaphores du désir et de l'énergie que Marie-Thérèse inspire au jeune quinquagénaire" (FHEL)
"Ah ! Naturellement vous ne comprenez pas que ces femmes ne sont pas tout simplement posées là comme un modèle qui s'ennuie. Elles sont prises au piège de ces fauteuils comme des oiseaux enfermés dans une cage. je les ai emprisonnées dans cette absence de geste et dans la répétiion du morif, parce que je cherche à saisir le mouvement de la chair et du sang à travers le temps. Et je désire souligner l'angoisse de toute chair qui , même à l'heure de son triomphe, "la beauté", est alarmée par les signes annonciateurs des altérations du temps." ( (propos rapporté par Françoise Gilot et Lake Carlton dans Vivre avec Picasso, 1965)
Les années de ténèbres
Le nouveau conflit mondial entraîne des tensions qui, bien sûr, se retrouvent dans les peintures de cette époque là. C'est Dora Maar, peintre et photographe, rencontrée en 1935 que l'on trouvera le plus souvent... "Natures mortes, vues d'atelier, paysages de Paris révèlent l'enfermement de l'artiste lorsque la guerre éclate dans la capitale, à travers une palette aux tons de plus en plus violents et durs." (FHEL)
"Un artiste n'est pas aussi libre qu'on pourrait le croire. C'est vrai aussi pour les portraits que j'ai faits de Dora Maar. Pour moi c'est une femme qui pleure. Pendant des années, je l'ai peinte en formes torturées, non par sadisme ou par plaisir. Je ne faisais que suivre la vision qui s'imposait à moi. C'était la réalité profonde de Dora." (propos rapporté par Françoise Gilot et Lake Carlton dans Vivre avec Picasso, 1965)
L'après-guerre
"La libération apporte à Picasso un nouveau souffle de créativité.La liberté retrouvée lui permet de reprendre sa fréquentation assidue de la Côte d'Azur qu'il avait découverte en 1920, cette fois en compagnie d'une nouvelle muse, Franioise Gilot, jeune peintre de veingt-deux ans rencontrée durant l'hiver 1943. Pendant dix ans, cette relation contribuera au renouveau créatif de l'artiste. L'environnement méditerranéen éveille alors dans son oeurvre des résonances mythologiques, et le nu féminin retrouve tous ses droits." (FHEL)
Une nouvelle lumière
La pratique de la céramique va permettre à Picasso sa rencontre avec Jacqueline Roque qui deviendra sa femme en 1961. Picasso se fixe définitivement dans le sud et Jacqueline va devenir le modèle favori de l'artiste.
"Depuis quand un tableau est il une démonstration mathématique ? Il est destiné non pas à expliquer (à expliquer quoi, je me le demande) mais à faire naître des émotions dans l'âme de celui qui regarde. il ne faut pas qu'un homme reste indifférent devant une oeuvre d'art, qu'il passe en jetant un coup d’œil négligent. Il faut qu'il vibre, s'émeuve, crée à son tour, par l'imagination sinon effectivement... Le spectateur doit être arraché de sa torpeur, secoué, pris à la gorge, qu'il prenne conscience du monde dans lequel il vit et, pour cela, il faut d'abord l'en sortir." (Propos rapportés par Geneviève Laporte dans "SI tard le soir" 1973
Les ateliers
En 1955, Picasso acquiert une villa sur les hauteurs de Cannes : La Californie, dont les vastes pièces vont se transformer en ateliers... après la maison comme sujet de prédilection, ce sera le thème du peintre et son modèle.
Femmes assises
Picasso va accumuler les portraits de Jacqueline, en 1963 par exemple, il y aura plus de 160 portraits d'elle, et notamment assise.
Les dernières années
A 90 ans, Picasso redouble de vigueur pour peindre encore et encore avec une frénésie de l'urgence. Il revient parfois sur des thèmes de son pays natal, revoyant des scènes de l'enfance... il revisite aussi des galeries de personnages : toreros, mousquetaires, comme autant de références à Rembrandt. Ses toiles deviennent très grandes.
"Tout le monde veut comprendre la peinture. Pourquoi n'essaie-t-on pas de comprendre le chant des oiseaux ? Pourquoi aime-t-on une nuit, une fleur, tout ce qui entoure l'homme sans chercher à les comprendre ? Tandis que pour la peinture, on veut comprendre. Qu'ils comprennent surtout que l'artiste oeuvre par nécessité ; qu'il est, lui aussi, un infime élément du monde, auquel il ne faut pas prêter plus d'importance qu'à tant de choses de la nature qui nous charment mais que nous ne nous expliquons pas. Ceux qui cherchent à expliquer un tableau font la plupart du temps fausse route. (Dans Christian Zervos "conversation avec Picasso" Cahiers d'art Paris 1935)

